Article de Presse


La Construction Moderne, n°47, 50e année, Ch.-Ed. Sée
29 Septembre 1935

Stade-Vélodrome du Parc des Princes
Architectes : j. HAOUR, E.C.P., et ALYMOFF, D.P.L.G.





Ce stade-vélodrome a succédé à un ancien vélodrome construit en 1897 qui existait au même emplacement. Ce vélodrome avec sa piste ovale, ses virages peu inclinés, ses gradins insuffisants, dut être entièrement reconstruit sur nouveaux plans.

Le stade-vélodrome actuel est universellement. Connu comme théâtre des grandes manifestations cyclistes et, plus particulièrement, comme aboutissement de la grande course internationale annuelle du Tour de France.

Il est également renommé pour les grands tournois de foot-ball qui se disputent sur sa pelouse.

Le stade-vélodrome du Parc des Princes tient à Paris le rôle de grande piste cycliste d'été dont le pendant, en période d'hiver, est le vélodrome de Grenelle, dit «Vel d'Hiv», vaste enceinte close et chauffée où se donnent les grandes épreuves d'hiver dont la plus populaire est la course des Six-jours à l'américaine.

Les deux vélodromes sont l'un et l'autre sous l'administration du journal sportif «L'Auto» et leur célébrité est mondiale.

Le Vel d'Hiv, que nous ne nous étions pas proposé de décrire ici, est renommé pour les excellentes dispositions de sa piste. Peut-être nous saura-t-on gré d'en indiquer l'essentiel :

Cette piste abritée consiste en un platelage en bois porté par des fermes en bois.

Elle mesure 250 mètres de tour, sur une largeur qui est de 6 m. 80 dans les parties droites et de 7 m. 45 dans les virages.

Aux dimensions près, elle ressemble à celle du stade-vélodrome du Parc des Princes (voir plus loin) ; c'est-à-dire qu'elle est composée de deux parties rectilignes et parallèles que réunissent deux virages courbes.

Le platelage qui forme le sol de la piste est formé de liteaux en sapin juxtaposés de 55 mm. de hauteur et de 26 mm. de largeur. Ces liteaux posés de champ sont solidarisés par des clous de charpentier.

Les fermes servant d'appui au platelage sont espacées de 1 m. à 1 m. 20.

Dans les virages, le bord extérieur se relève progressivement jusqu'à donner à la piste une inclinaison d'environ 40 degrés. Pareille inclinaison est nécessaire lorsqu'on atteint des vitesses de l'ordre de 90 km-heure qui caractérisent les courses derrière motocyclettes.

Pour compléter ce qui a trait au Vel d'Hiv, indiquons que le terrain encadré par la piste est utilisé pour diverses manifestations athlétiques et sportives. Son sol bétonné sert aussi de Patinoire sur glace. A cet effet, l'enduit de ciment recouvre un réseau de tuyaux de congélation à circulation de saumure.

Le Stade-Vélodrome du Parc des Princes est situé sur l'ancienne zone des fortifications, à la limite de Boulogne-sur-Seine.

Cette région a été aménagée de larges percées qui assurent au stade-vélodrome de nombreux accès.

Sauf du côté Sud où il borde un autre stade édifié par la Ville de Paris, il est libre sur ses autres côtés et en bordure de voies diverses. Cette situation a permis de multiplier les entrées. En fait, grâce aux excellentes dispositions complétant cette situation, l'écoulement des foules à l'entrée comme à la sortie, s'effectue avec un ordre et une rapidité tout exceptionnels.


Programme.

Le terrain a été concédé à la société exploitante pour une période de 40 ans. La brièveté de cette concession a nécessité la recherche d'une grande économie d'installation aux fins d'un amortissement rapide.

Le programme comportait en ordre principal ; une grande piste cycliste de dimensions olympiques et capable de servir aux courses de sprinters (coureurs sans entraînement mécanique) et également aux courses de stayers (coureurs derrière motocyclettes).

Cette piste devait être accessible par un passage direct aux coureurs du Tour de France et autres coureurs routiers, terminant comme d'usage par un tour de piste devant le poteau d'arrivée.

Le terrain ceinturé par la piste devait être aménagé en pelouse pour un jeu de foot-ball (rugby et association) aux dimensions olympiques.

Enfin, en vue d'assurer la rentabilité du capital engagé, il s'agissait de placer le plus grand nombre possible de spectateurs en leur assurant une bonne visibilité sur l'ensemble de la piste et de la pelouse.


Dispositions adoptées (Fig.1).

Cette nécessité d'étager un très grand nombre de gradins autour du terrain, se conciliait mal avec une limitation de hauteur telle que l'imposait la Ville de Paris.

Cette hauteur ne pouvait en effet, aux termes de la concession, dépasser 14 mètres pour tous gradins ou constructions par rapport aux voies d'alentour.

Prescrite aussi pour les stades voisins, cette limitation de hauteur avait eu, sans doute, pour but de conserver à toute cette zone le caractère d'espace libre.

La difficulté fut résolue d'une manière très ingénieuse par les Architectes.

Leur solution consista à faire approfondir tout le terrain central dont le niveau fut descendu de 4 mètres, tandis que les déblais de l'excavation étaient apportés à la périphérie.

Travail considérable si l'on en juge par le cube de terre mis en oeuvre ; mais qui procura un résultat très avantageux.

En effet, le remblai disposé en pente des deux côtés, fut du côté intérieur taillé en gradins dont le nombre, grâce à l'approfondissement, put atteindre jusqu'à 42 rangées.

Quant à la pente extérieure du remblai, de hauteur modérée, on en fit des escaliers d'une ampleur tout à fait inusitée.

Grâce enfin aux multiples voies qui entourent le terrain, chaque catégorie de places fut pourvue d'accès directs et entièrement séparés.

En fait, les diverses catégories de places sont rigoureusement séparées avec leurs entrées, leurs escaliers, les bars, leurs w.-c., et toilettes.

Dispositions d'une haute valeur pratique lorsqu'il s’agit de contrôler et de caser rapidement quelque 60.000 spectateurs, de les maintenir dans leurs sections respectives et finalement d'assurer leur sortie pour ainsi dire instantanée.

Dans les intervalles où le talus extérieur n'a pas été utilisé en escaliers, on l'a garni de plantations, ce qui assure la fixation des terres et procure un aspect agréable.

Une autre conséquence de cette disposition originale a été de mettre le terrain à l'abri de la vue, en sorte qu'il a suffi d'un grillage pour former la clôture générale du stade.

Remarquons que l'accès des gradins se fait uniquement par les escaliers extérieurs et qu'il n'existe pas de vomitoires.


Piste cycliste.

La piste cycliste a une longueur de 454 m. 54 (onze tours formant 5 kilomètres). Cette longueur est mesurée, comme indiqué précédemment, sur l'axe d'une bande tracée à 0 m. 30 du bord intérieur de la piste.

La piste se décompose en :

2 parties rectilignes et parallèles de chacune 87m.07 et 2 virages courbes mesurant chacun 140m.20.

Le tracé d'un virage est indiqué fig.2. C'est une courbe à 5 centres du genre «anse de panier».

Le bord extérieur de la piste est relevé de 0m.75 par rapport au bord intérieur dans les parties droites.

Dans les virages, le bord extérieur se relève progressivement jusqu'à 4m.50 de hauteur.

La surface du virage est engendrée par une droite appuyée sur les deux bords qui forment directrices ; c'est donc une surface réglée.

Dans le but d'obtenir pour cette surface une pente s’élevant par progression insensible, on a été amené à amorcer la rampe bien avant l'entrée du virage. Pour la régularité parfaite d'un tel tracé de même que pour son exécution sur le terrain, les architectes de stades sont obligés de s'en rapporter à un spécialiste.

Ce spécialiste fut dans le cas présent M. Marcel Durand, auteur de la plupart des pistes cyclistes exécutées en France. Ce spécialiste joint à ses connaissances théoriques l'expérience de la pratique en sa qualité d'ancien coureur cycliste.

Ajoutons que pour les pistes à virages très relevés telles que celle-ci, on ajoute le long du bord intérieur de ces virages, une petite bande de 0m.60.de largeur de faible inclinaison afin de permettre les faibles vitesses sans risque de dérapage. Les coureurs la désignent sous le nom de «Côte d'Azur» dont l'origine remonte à l'époque où, sur les Pistes, elle était marquée par une peinture bleue.

La piste du Parc des Princes a été établie à même le sol, contrairement à d'autres pistes qui sont sur ossature, tout au moins dans les virages.

Pour son exécution on a fait une forme en béton dans un encaissement. Le béton est armé d'un treillis et des joints de dilatation ont été ménagés.

L'enduit superficiel est en ciment teinté de rose afin de diminuer la réverbération de la lumière.

Cet enduit a été légèrement grainé par frottis au chiffon afin de s'opposer au dérapage.

L'écoulement de l'eau, favorisé par la pente, est recueilli dans un caniveau longeant le bord intérieur de la piste et recouvert d'un platelage en lattes de bois. Le drainage de ce caniveau qui sert également à assécher la pelouse, s'opère par des puisards.

Un tunnel relie la piste avec la rue du Vélodrome pour l'accès direct des coureurs routiers.

Un autre tunnel relie la pelouse et la piste avec le quartier des coureurs.


Pelouse de Foot-Ball (Fig. l).

Le terrain ceinturé par la piste a permis l'inscription d'un jeu de 136m.x70m, avec bande de touche de 5 mètres de largeur tout autour.

L'excavation générale de 4 mètres de profondeur, a mis à découvert un sol de sable qui, après nivellement, a reçu un apport de terre végétale et un gazonnement.

Le sol a été drainé par un réseau de tuyaux de grès s'écoulant dans le caniveau dont il a été parlé.


Quartier des coureurs (Fig. 1).

Le quartier des coureurs a été situé en annexe sur une bande de terrain du côté Sud.

Il possède une entrée indépendante et communique par un tunnel avec la pelouse et de là, avec la piste. Il comporte une rangée de cent cabines, tandis qu'un bâtiment central est aménagé en vestiaires et douches avec une infirmerie, un cabinet médical et un atelier pour motos.

Ces installations servent également aux joueurs de foot-ball.


Tribunes et gradins (fig. 3 à 10).

Ainsi que cela a été exposé ci-dessus, chaque catégorie de gradins possède son entrée munie de guichets, son escalier, son bar et ses w.-c.-toilettes, ce qui la rend autonome. Ajoutons qu'entre catégories voisines des clôtures infranchissables ont été disposées de manière à décourager toute tentative de « resquillage » de la part de certains spectateurs débrouillards.

Il existe deux tribunes couvertes, situées comme d'usage, le long des parties rectilignes de la piste. L'une est la Tribune dite de l'Auto ou d'Excellence, l'autre est la tribune dite du Tour de France.

L'une et l'autre comportent 8.000 spectateurs assis.

Ces tribunes se prolongent latéralement vers les virages et forment des sections désignées A, B, C, D, qui comportent chacune 3.000 places assises et couvertes.

Enfin, le long des virages, s'étagent les gradins découverts comportant 16.000 places debout, soit 32.000 places pour les deux virages.

L'ensemble des spectateurs est ainsi de 60.000. Ainsi qu'il a été indiqué précédemment, l'accès des gradins se fait par les escaliers escaladant la pente extérieure du talus.

Seule, la Tribune de l'Auto a ses accès par des couloirs et escaliers intérieurs. Cette tribune est réservée aux officiels et au public des places les plus chères. Elle est précédée d'une Cour d'honneur et ses gradins s'adossent à une façade décorative en briques rouges et motifs de béton enduit de mignonnettes. Cette façade forme une ordonnance robuste et bien caractéristique d’architecture sportive.

Cette tribune de l'Auto abrite 42 rangées de gradins avec au centre, un buffet-bar. Des loges desservies par un promenoir sont rangées en bordure de la piste.

Les gradins ont en général :

0 m. 66 à 0 m. 70 de largeur

et 0 m. 30 de hauteur.

Cette hauteur est divisée par des marches intermédiaires dans les passages créés pour gagner les gradins supérieurs.

On s'est attaché à procurer la meilleure visibilité de l’ensemble de la piste et de la pelouse pour toutes les places, recherche qui a amené à donner un profil général parabolique à la succession des gradins.

La tribune de l'Auto est pourvue de sièges formés de fauteuils-strapontins.

La tribune du Tour de France ne comporte que des bancs fixes, de même que les tribunes A, B, C, D.

Quant aux gradins découverts, ils sont en béton et mesurent 0m.33 de largeur et 0 m. 30 de hauteur.

A la tribune de l'Auto les gradins sont supportés par une ossature de béton armé, ce qui a permis d'installer au-dessous les locaux d'administration et ceux de la presse sportive, un logement de gardien, les w.-c. et toilettes.

La toiture très légère, se compose d'une couverture en plaques ondulées de fibro-ciment portée sur des poutres métalliques à croisillons. Celles-ci s'appuient, d'une part sur une rangée de poteaux métalliques très espacés, d'où elles se prolongent en un porte-à-faux de 16 mètres.

L'autre tribune est couverte de la même façon.

La piste se complète, comme d'usage, par un poteau d'arrivée, un tableau à inscriptions mobiles et par des haut-parleurs.


Retour vers "Presse"

Retour vers "Situation"